Certains se souviennent peut être du film Invasion Los Angeles de John Carpenter, datant de la fin des années 1980. Dans une scène marquante de cette œuvre, le héros se rendait compte que le paysage urbain fourmillait de messages subliminaux. Ces informations étaient révélées par une paire de lunettes de soleil très particulière…
Il y a une vingtaine d’années, une société japonaise : DENSO WAVE INCORPORATED développe et rend populaire un produit sous la marque «QR Code» (pour «Quick Response Code»).
Que chacun se rassure : QR Code ne semble pas être un vecteur de colonisation extra-terrestre, mais simplement une représentation graphique normée de données numériques.
La principale caractéristique de ce codage – également appelé Code matriciel – est qu’il peut être facilement traduit en données numériques par des terminaux informatiques, exactement comme un code barre.
D’ailleurs, pour comprendre l’intérêt du QR Code, il suffit de le comparer à un code barre :
Code barre traditionnel | QR Code | |
Dimension(s) exploitée(s) | 1 | 2 |
Informations exploitables par code | jusqu’à 103 caractères alphanumériques | jusqu’à 4296 caractères alphanumériques |
Reconnaissance malgré une altération du graphique | Très faible | Bonne (tolère jusqu’à 30% d’altération) |
Epoque de création | Début des années 1950 | Fin des années 1980 |
QR Code a fait l’objet de plusieurs standardisations (dont internationales AIM et ISO/IEC18004). Les spécifications techniques du QR Code ont été largement diffusées par la société DENSO WAVE qui indique sur son site Internet que l’utilisation du standard QR Code est libre sous réserve de mentions.
QR Code n’est pas la seule norme de code graphique à deux dimensions (ex: Flashcode, PDF417, DataMatrix, Maxi Code, Code EAN servant à l’affranchissement du courrier en Suisse etc.), mais la popularité de la marque japonaise a visiblement gagné l’ensemble du Web.
Cette célébrité est propagée par les acteurs de la communication et du marketing. En effet, le QR Code semblait initialement conçu pour le monde de la logistique, mais ses spécifications ont facilité sa récupération par de multiples secteurs. Aujourd’hui il s’invite régulièrement dans la cour du « Buzz » publicitaire.
Encore une fois, la créativité pétillante des agences de communication risque de donner des cheveux blancs aux juristes rigoureux, et pour cause : le QR Code peut contenir n’importe quelle information (dont des informations dynamiques de type hyperliens, N° de téléphone etc.). Naturellement cette information reste inconnue tant qu’on n’a pas décodé le graphique.
C’est un fait : chaque QR Code doit être interprété avant de révéler ses secrets. Heureusement, un traitement informatique enfantin et quasi instantané (ou une laborieuse analyse manuelle), permettra d’en découvrir le sens.
A ce stade, si les QR Codes ne font pas naître de psychose de juriste dans votre esprit, nous vous invitons à partir à leur découverte au gré du Web. Il vous suffira de vous munir d’un terminal équipé d’une caméra, de récupérer et d’y installer un des logiciels gratuits de décryptage de QR Codes. Vous pourrez alors commencer une exploration passionnante de ce monde de messages cachés (pourquoi pas directement au sein de cet article). Il est naturellement possible d’utiliser n’importe quel décodeur de QR Code, le support du téléphone portable n’étant pas obligatoire (par exemple le ZXing Decoder Online).
En revanche, si vous exercez une profession légale ou para-légale dans le secteur des nouvelles technologies ou de la communication/distribution, nous vous invitons :
– à rajouter un décodeur de QR Code à la liste de vos outils professionnels
– à reconsidérer l’importance stratégique des noms de domaine sous extension .mobi (principale destination des QR Codes intégrant des hyperliens)
– à garder votre sang froid : même si les codes matriciels ne sont pas directement compréhensibles par le grand public, ils ne semblent pas mettre en évidence de vide juridique en droit français. Par exemple, si un QR Code est porteur d’un message publicitaire, il restera soumis au régime juridique existant puisque les textes communautaires et la jurisprudence nationale s’accordent pour reconnaître que « toute forme de communication » (directive CEE n°84/450 du 10 septembre 1984), « tout message à destination du public » (Cass. Crim., 29 juin 1999) peut constituer une publicité.
– à développer sans tarder votre capacité à reconnaître un code matriciel lorsque vous en croisez un… Pourquoi pas à l’arrière d’un autobus ?!