Un an après avoir été condamné à verser près de 40 millions d’euros à LVMH, en juin 2008, eBay a eu gain de cause à l’égard de L’Oréal auprès du Tribunal de Grande Instance de Paris, mercredi 13 mai 2009, dans une affaire similaire.
Les juges ont débouté L’Oréal de son action engagée en 2007 contre eBay, accusé d’avoir écoulé des contrefaçons (faux parfums et faux produits cosmétiques) sur sa plateforme en ligne et d’avoir violé le réseau de distribution sélective du groupe de luxe.
Dans son jugement, le Tribunal a estimé qu’eBay n’était qu’un simple « hébergeur » (personne physique ou morale assurant le stockage en ligne d’informations et leur mise à disposition du public) et non un « éditeur », responsable de ses contenus. Pour cela, il s’est notamment appuyé sur la Loi pour la Confiance dans l’Economie Numérique (LCEN) du 21 juin 2004, transposant en droit français la directive communautaire sur le commerce électronique du 8 juin 2000, qui établit une distinction entre le régime de responsabilité de l’hébergeur et celui de l’éditeur de contenus en ligne.
Les hébergeurs bénéficient en effet d’un régime de responsabilité limitée, qui ne s’applique que « s’ils acquièrent la connaissance de contenus litigieux ou illicites sur un site qu’ils hébergent et qu’ils n’ont pas réagi promptement pour retirer ces données ou en rendre l’accès impossible » (article 6, I, 2 de la loi).
En l’espèce, les magistrats ont considéré qu’ eBay ne faisait qu’ « aider » les internautes à vendre leurs biens mais qu’il ne « contrôlait » pas le contenu des annonces. Les magistrats ont en outre estimé qu’eBay avait rempli son « obligation de loyauté » et mis en œuvre des « moyens importants de lutte contre la contrefaçon » (par exemple, par le biais du système VeRO).
Les juges ont donc appliqué à la plateforme d’enchères en ligne le régime de responsabilité aménagé des prestataires d’hébergement.
Cette décision, considérée par Alexandre Von Schirmeister, directeur général du site d’enchères comme une « victoire pour eBay et pour les consommateurs » est somme toute logique puisqu’il est quasi impossible pour ce dernier de contrôler tous les produits mis en vente sur sa plateforme.
Il est à noter que cette décision marque une évolution notable dans la jurisprudence française sur les prestataires de services en ligne.
En effet, dans des décisions récentes opposant eBay à LVMH ou Hermès, les juges avaient refusé au site d’enchères la qualité d’ « hébergeur » au sens de la LCEN et l’avaient condamné pour contrefaçon de marques, estimant qu’ « eBay avait commis des fautes en manquant à ses obligations de s’assurer que ces activités ne généraient pas des actes illicites ».
Cependant, à ce jour, les juges n’ont pas mis de point final à l’affaire.
Ils ont en effet fixé une nouvelle audience le 25 mai 2009, au cours de laquelle les deux parties devraient s’entendre sur la nomination d’un médiateur chargé de faciliter une collaboration pour lutter contre la contrefaçon.
Etonnamment, les deux parties se sont félicitées à l’unisson de la décision rendue, le groupe L’Oréal précisant qu’il « accepte la médiation judiciaire demandée par le Tribunal afin de définir d’un commun accord les mesures anti contrefaçon pérennes et efficaces qui sont nécessaires ».
Parce qu’ils le valent bien…