Le 24 septembre 2008, le projet de loi « Création et Internet », également appelée loi HADOPI (Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet), a de nouveau été mis à mal par le Parlement européen. Ce dispositif, destiné à compléter l’arsenal civil et pénal français en matière de lutte contre la contrefaçon, est très controversé.
Rappelons que cette loi prévoit une riposte graduée afin d’endiguer le phénomène du téléchargement illégal.
Des sanctions pourraient être prononcées à l’encontre du détenteur de la ligne qui a servi au téléchargement. Par conséquent, une présomption de téléchargement illégal pèserait sur l’abonné.
Le système de sanctions prévu par ce projet de loi repose sur un acteur central : la HADOPI. Cette autorité administrative indépendante aurait différents rôles dès lors qu’un téléchargement illégal serait constaté :
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Elle enverrait, ou chargerait le FAI (fournisseur d’accès à Internet) d’envoyer, un courrier électronique d’avertissement à l’abonné. Celui-ci devrait alors répondre à l’obligation de surveillance de sa ligne internet afin de stopper le téléchargement illégal.
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Si dans les 6 mois, le problème venait à se renouveler, un nouveau courrier électronique serait envoyé à l’abonné et serait éventuellement suivi d’une lettre recommandée avec accusé de réception (mais ce n’est pas obligatoire).
Si dans l’année de la réception du premier courrier électronique, la ligne de l’abonné n’a toujours pas été sécurisée, il encourrait deux types de sanction :
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Sa ligne internet pourrait être suspendue pour une période allant de trois mois à un an.
Pendant cette suspension, l’abonné continuerait à payer son abonnement mensuel. -
Il pourrait faire l’objet d’injonctions de prendre des mesures de sécurisation.
Le projet de loi « Création et Internet » a reçu un accueil mitigé en France. La CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés), l’AFUL (Association Francophone des Utilisateurs de Linux et des Logiciels Libres), certains artistes reconnus, des députés européens et des parlementaires français, ont émis des avis critiques sur cette loi. A côté de cela, le Conseil d’Etat, la SACD (Société des Auteurs et Compositeurs dramatiques), la SACEM (Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique), des artistes français, des cinéastes, soutiennent ce projet de loi.
Le Parlement européen n’apporte pas non plus son soutien à l’adoption de ce projet de loi.
Le 10 avril 2008, il avait désavoué la riposte graduée en adoptant une résolution au terme de laquelle il engageait « la Commission et les États membres à reconnaître qu’Internet est une plate-forme pour l’expression culturelle (…) et, par conséquent, à éviter l’adoption de mesures allant à l’encontre des droits de l’homme, des droits civiques et des principes de proportionnalité, d’efficacité et d’effet dissuasif, telles que l’interruption de l’accès à internet ».
Le 24 septembre 2008, après une seconde présentation du projet de loi au Parlement européen, de nouvelles critiques ont été formulées. Le Parlement adopte l’amendement 138 qui impose qu’ « aucune restriction aux droits et libertés fondamentales des utilisateurs finaux ne doit être prise sans autorisation préalable de l’autorité judiciaire ».
Le Parlement européen désapprouve le fait que les sanctions soient prononcées par une autorité administrative indépendante, l’HADOPI, et non par une autorité judiciaire.
L’adoption de cette loi n’est pas moins sûre : elle va être présentée au Conseil européen avant de revenir devant le Parlement européen.
Au niveau national, la Ministre de la Culture, Christine Albanel, a prévu de présenter ce projet de loi au Sénat début novembre. Bien que l’avis du Parlement européen ne soit que consultatif, la France, si elle force malgré tout l’adoption de cette loi, pourrait se voir opposer la non conformité de la riposte graduée au droit européen.